Série 5 – De l’Obélisque à la Tour Eiffel
Lorsque vous vous promenez dans Paris vous aurez l’occasion d’admirer, en plein centre de la, ville, sur la place de la Concorde, un monument… égyptien. : l’Obélisque (image 1). Un monument ? Disons plutôt une gigantesque aiguille de pierre, haute de 23 mètres, présentant aux promeneurs ses quatre faces gravées de triangles, de cercles, de barres, d’images d’oiseaux et d’hommes, reposant sur un socle rappelant le souvenir du roi Louis-Philippe (image 2).
Cet obélisque – telle est l’appellation donnée à ce genre de monument de forme haute et allongée, d’origine égyptienne a une curieuse histoire, qui mérite d’être contée.
Elevé dans des temps très anciens, par le roi d’Egypte Ramsès II à l’entrée du Temple d’Ammon, à Louksor, il fut amené, et non sans peine, à Paris, bien des siècles plus tard, en 1833.
Un long et difficile voyage, vous l’imaginez sans peine. Ce ne fut pas chose facile, en effet, que de transporter d’un seul bloc ce monument encombrant, des confins de la haute Egypte jusqu’à Paris. Un homme surtout s’y employa, qui ne recula devant aucun effort pour mener à chef cette tâche peu commune : le Français Champollion, orientaliste de grand mérite, qui a laissé un nom dans l’histoire pour avoir le premier déchiffré les hiéroglyphes (image 3), c’est-à-dire les caractères en forme de dessins qu’utilisaient les Égyptiens de l’antiquité.
C’est au cours d’une mission scientifique en Egypte, effectuée par Champollion d’août 1828 à décembre 1829, que le vice-roi Mohamed Ali autorisa ce savant à faire déplacer a Paris l’obélisque de Louksor.
Suivons un instant, dans son voyage au pays des Pharaons, celui que les Français surnommaient l’« Égyptien » : il arrive à Alexandrie le 18 août 1828 et remonte presque aussitôt le Nil en direction de Thèbes, où il débarque le 20 novembre. Poursuivant son voyage, il visite les temples, les villes, les tombeaux, se consacrant surtout à l’étude des hiéroglyphes qui figurent sur les monuments. Le 5 décembre 1829, il prend le chemin du retour. Mais son prodigieux labeur l’a épuisé : il meurt à Paris le 4 mars 1832, non sans avoir eu la suprême joie d’apprendre que l’obélisque de Louksor a été conduit sans dommage au bateau qui doit l’amener en France. Sans accident mais non sans difficultés ! C’est qu’il faut, tout d’abord, dégager le monument de l’endroit où, pendant tant de siècles, il a symbolisé l’antique civilisation égyptienne. Les travaux, dirigés par l’ingénieur Lebas, sont retardés par le choléra, qui tue nombre d’ouvriers. Ce n’est qu’en automne 1832 que l’énorme pierre, munie d’un revêtement de bois protecteur, est prête à être chargée à bord d’un long bateau étroit et plat (image 4), aménagé tout exprès pour la recevoir. Mais surgit une nouvelle contrariété : le Nil est en crue ! C’est en janvier 1833 seulement que l’obélisque vogue sur la Méditerranée. En août-de la même année, il arrive à Paris. Le 25 octobre 1836, enfin – une fois terminée la construction de son piédestal – il est dressé, aux acclamations de la foule (image 5) sur la place de la Concorde, où il éveille aujourd’hui encore, à bon droit ; la curiosité et l’admiration de tous les touristes et des Parisiens eux-mêmes !
Autre curiosité de Paris qui, elle aussi, fait lever la tête à quiconque arrive dans cette ville pour la première fois la Tour Eiffel (image 7).
Tout comme l’Obélisque, elle a sa grande et sa petite histoire. C’est qu’elle non plus ne fut pas édifiée sans peine ; imagine-t-on que son créateur, l’ingénieur Eiffel (image 8), fut tout d’abord vertement critiqué pour avoir eu l’idée, audacieuse en vérité, de construire, à l’occasion de l’Exposition universelle de 1889, une tour géante de 300 mètres de haut !
Mise en chantier en 1887, ses fondations (image 6) nécessitèrent, à elles seules, le déplacement de 31.000 mètres cubes de terre et l’emploi de 12.000 mètres cubes de matériaux. Puis le montage commença, dont l’ensemble n’exigea pas moins de 15.000 pièces différentes, chacune ayant fait l’objet d’un dessin, d’une étude, d’un calcul spécial ! Assemblées, ces piètes totalisèrent le chiffre impressionnant de 7 millions de trous ! Placées bout à bout, elles auraient atteint une longueur de 70 kilomètres, soit à peu près la distance de Paris à Beauvais !
Le rivetage mécanique ou électrique n’étant pas encore connu à l’époque, c’est à la main, au marteau, que furent évasés les millions de rivets utilisés. Au début de juillet 1888, la Tour Eiffel qui, quelques mois auparavant encore, se présentait sous l’aspect d’un épouvantable amas de ferraille (image 10), parvint à sa demi-hauteur (image 9), suscitant, au fur et à mesure qu’elle s’élevait au Champ-de-Mars en bordure de la Seine (image 11), l’enthousiasme ou, au contraire, les quolibets des architectes, des ingénieurs, des poètes et des chansonniers eux-mêmes. Ne fredonnaient-ils pas :
Et l’on dit que tout en haut
On verra jusqu’au Congo
Brazza chasser la gazelle
De la Tour Eiffel.
Mais, en dépit de ses détracteurs, la Tour Eiffel, mètre par mètre, poursuivit son ascension, jusqu’en cette mémorable journée du 31 mars 1889 où flotta pour la première fois à son faite, à 300 mètres de haut, le drapeau de la victoire. Tôt après, elle fut le clou de l’Exposition universelle ; tous les visiteurs la prirent littéralement d’assaut, soit en utilisant les ascenseurs, soit en faisant à pied l’ascension des 1.700 marches pratiquées jusqu’au sommet (image 12). Utilisée par la suite pour les premières expériences françaises de T. S. F., puis pour de prestigieuses illuminations, elle n’a jamais cessé, depuis lors, de représenter aux yeux du monde entier Paris et le génie français.