Dans les temps très reculés, en Egypte, il était d’usage que les pharaons commencent à aménager leur sépulture dès l’instant où ils montaient sur le trône; à cet effet, ils faisaient construire un temple immense, pour y loger leur sarcophage et des trésors. Lorsque le pharaon venait à mourir, on l’embaumait soigneusement et on le plaçait dans un cercueil en or ciselé, délicatement orné.
Puis, en grande pompe, le peuple conduisait le roi défunt au tombeau, que l’on remplissait ensuite de joyaux et de présents et que l’on scellait finalement ; la tombe était alors confiée aux gardiens du temple, qui avaient surtout pour tâche de défendre les sépulcres royaux contre les troupes de pillards attirés par un amas de richesses aussi considérable. Mais cette surveillance ne servait guère ; l’une après l’autre, presque toutes les tombes furent en effet violées et leurs trésors dérobés. C’est d’ailleurs pourquoi les pharaons cherchèrent peu à peu à préserver leur dernière demeure au moyen de parois très épaisses ; en outre, les portes furent soigneusement dissimulées et les voies d’accès emmurées ; enfin, on en arriva même à construire des montagnes entières en pierre de taille les pyramides pour mettre les tombeaux à l’abri. Ce fut peine perdue; les voleurs parvinrent néanmoins jusqu’aux sarcophages et s’emparèrent de tout ce qu’ils purent emporter.
A partir de l’an 1500 av. J.-C., afin de pouvoir mieux les surveiller, les tombeaux des pharaons furent aménagés dans la vallée Bibân-el-Muluk, près de l’antique cité de Thèbes, une vallée étroite et retirée. Malgré cette précaution, les sépulcres furent profanés et pillés au cours des ans. Un tombeau, cependant, semblait avoir été épargné : celui du jeune roi Tut-Ank-Ammon ; quelques siècles après la mort du pharaon, l’entrée du sépulcre fut ensevelie et c’est seulement en novembre 1922 qu’on la mit au jour, en procédant à des fouilles dans la Vallée des Rois (image 1).
C’est à deux Anglais, le comte de Carnarvon et Howard Carter, que revient l’honneur d’avoir fait cette importante découverte. Seize marches en pierre les conduisirent de la vallée à une lourde porte, sur laquelle était encore appliqué le cachet de Tut-Ank-Ammon. Derrière elle se trouvait, encombré de pierres et de galets, un profond corridor, très incliné. Une fois ce passage déblayé, on découvrit à son extrémité une seconde porte, également munie de cachets et que l’on ouvrit. On parvint ainsi dans l’antichambre du tombeau. Mais quel désordre ! Tout avait été bouleversé par des voleurs qui comme on parvint à l’établir s’étaient introduits dans le sépulcre une année déjà après l’ensevelissement de Tut-Ank-Ammon. Mais les gardiens étaient intervenus avant l’accomplissement du forfait, de sorte que le dommage ne fut pas considérable. En particulier, la momie subsista intacte dans le sarcophage ; quant aux objets, ils furent entassés tant bien que mal et l’on cacheta de nouveau la porte donnant accès au tombeau. C’est dans cet état que celui-ci se trouvait quand les Anglais le découvrirent. Il serait trop long d’énumérer toutes les choses qui y étaient alors contenues; seules les plus importantes sont ci-après mentionnées.
L’antichambre, très petite, était remplie d’objets provenant du palais royal (image 2) ; des lits et des admirables coffrets, portés par des animaux, gisaient çà et là ; des fragments de chars de combat se trouvaient réunis dans un coin, roues et timons garnis d’or massif et richement décorés ; à côté d’eux, on avait déposé des bahuts, des vases et des statuettes. Mais le plus beau de tous ces objets, c’était sans contredit le trône royal (image 3), dont le dossier en or et en pierreries représente la reine frictionnant, avec de l’huile aromatique, le pharaon somptueusement vêtu.
Une porte donnant accès dans une petite chambre latérale se trouvait dissimulée dans l’une des parois. Ce local aussi était plein d’objets précieux ; entre autres une ravissante statue du roi. Gardée par deux grandes statues en ébène et en or, une large porte fermait l’entrée du sépulcre proprement dit (image 4). Une fois cette porte ouverte, on se trouva en face d’un coffret en bois, couleur or et bleu foncé, qui contenait la momie du roi.
A proximité immédiate de ce sanctuaire, on découvrit un dernier local : la chambre du trésor (image 5). Sur un piédestal très élevé se trouvait la statue d’un chacal, le gardien sacré des sépulcres royaux. Derrière lui était un coffre précieux, contenant les viscères du pharaon. Plus loin, on découvrit une reproduction, en miniature, du vaisseau de la flotte royale, destiné au transport de l’âme pharaonique sur les eaux de l’au-delà (image 6), puis une statue représentant le pharaon sur un léopard noir (image 7), qui symbolisait la domination de Tut-Ank-Ammon sur la haute et la basse Egypte, enfin un faucon en or ciselé (image 8), portant sur sa tête un grand disque solaire, emblème de Phébus.
Dans le grand coffre doré du sépulcre, on trouva successivement quatre coffrets semblables, tous richement ornés, chacun plus petit que celui dans lequel on l’avait dissimulé Le dernier contenait un sarcophage de quartz jaune, fermé au moyen d’une plaque de granit pesant 600 kg. ; dedans se trouvait un cercueil en bois, ayant la forme d’une momie et reproduisant exactement les traits du jeune roi. Le front de cette image était ceint d’une couronne de fleurs fanées, dernier hommage d’un peuple affligé. Ce cercueil renfermait lui-même un second coffret, identique au premier. Enfin apparut le cercueil proprement dit (image 9), contenant la momie entourée de bandeaux. En or massif, richement serti de pierreries, il reproduit lui aussi, très exactement, les traits du pharaon défunt. Le visage est admirablement ciselé ; le front est surmonté des animaux sacrés vautour et serpent et les mains tiennent un fouet et un sceptre, insignes de la royauté. Lorsqu’on eut soulevé le couvercle de ce superbe cercueil, on trouva la momie absolument intacte, toute noire, entourée de larges bandeaux en or. La tête était entièrement recouverte d’un masque en or, orné de pierreries et d’émaux (image 10), et une triple chaine encadrait le cou.
Lentement et prudemment, on enleva l’un après l’autre les bandages de la momie; ils recouvraient des objets de parure et des poignards. Le corps fut enfin mis à nu, fortement disloqué et carbonisé. Délicatement, on éloigna les voiles qui cachaient encore la face; alors apparut la tête de Tut-Ank-Ammon, un jeune homme de 18 ans peut-être (image 11). Les quelques personnes qui virent le visage de la momie s’accordent à le trouver très fin et d’une grande beauté; le front du jeune pharaon était ceint d’un large ruban en or, avec émaux et perles, soutenant une coiffe en batiste, délicatement brodée.
L’image 12 montre le plan du sépulcre que nous venons de parcourir. Le chiffre 1 indique l’emplacement des seize marches de l’escalier d’entrée ; le chiffre 2 montre le corridor conduisant à l’antichambre (chiffre 3); les chiffres 4 5 et 6 font voir où se trouvent la petite chambre latérale, puis le sarcophage, enfin la chambre du trésor.
Tous les objets enlevés du tombeau de Tut-Ank Ammon ont été soigneusement conservés ; ils sont actuellement exposés au musée du Caire. Quant à la momie, elle a repris sa place dans le sarcophage; selon une décision du gouvernement égyptien, la dépouille du roi défunt ne doit pas devenir un objet de curiosité, mais reposer éternellement et en toute tranquillité dans son tombeau.
par le Dr Hendrick, Leyde